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La voiture individuelle : entre progrès technologique et optimisation de l’usage

Le problème n’est pas l’outil, mais la manière dont on s’en sert. En matière de politique de lutte contre le changement climatique, ce vieil adage s’applique aussi à la voiture. Laissez de côté vos aprioris sur la voiture et découvrons comment composer avec cette dernière dans la transition énergétique.

Devons-nous supprimer la voiture ? 

La voiture est le mode de transport le plus utilisé au quotidien. Pour de nombreux territoires situés hors des centres urbains, elle est d’ailleurs le seul moyen de transport permettant à ces habitants d’accéder à leurs emplois et aux services. À court terme, même en repensant l’aménagement du territoire, il est illusoire de penser que notre société peut se séparer de la voiture qui permet à 70% de la société de se rendre sur leur lieu de travail.  

Cependant en France, le transport est le principal poste d’émissions de GES (31 % en 2019[1]). Au sein de ce poste, les émissions proviennent majoritairement des voitures et les ⅔ des km parcourus le sont sur de courtes distances. Ici, c’est donc la consommation de carburant, via le pétrole qui est responsable de l’impact climatique de la voiture. Par ailleurs, une voiture étant un produit particulièrement manufacturé, sa production génère également une quantité non négligeable de CO2 et ce bilan n’est pas comptabilisé dans la contribution du transport aux émissions de CO2 en France. 

En substance, si la voiture a eu, jusqu’à aujourd’hui, une grande responsabilité dans le changement climatique, son omniprésence dans la société nous impose de composer avec elle et de l’inclure dans le panel de choix que nous avons pour la réduire. 

Ainsi, une politique publique pragmatique et acceptable de lutte contre le changement climatique doit prendre en compte l’aspect technique, mais également adopter un angle centré sur l’usage de ces véhicules. 

Nous pouvons alors avoir recours à des véhicules aux motorisations moins émettrices de CO2 que le pétrole comme l’électricité. Nous pouvons également optimiser l’usage des véhicules en les partageant comme avec le covoiturage. Sur les trajets domicile-travail, le taux de remplissage des voitures est de 1,1 personne. Autrement dit, les voitures en circulation sur ces trajets ne transportent qu’une seule personne alors que les véhicules ont une capacité de 4 places. En covoiturant, un conducteur transporte des passagers de manière que ces derniers n’aient pas à utiliser leur propre voiture. 

La voiture green existe-t-elle vraiment ? 

Aujourd’hui, le parc automobile Français est majoritairement constitué de véhicules thermiques de plus de 10 ans[3]. La conversion nécessaire de ce parc sera non seulement coûteuse en argent public et privé, mais également en terme environnemental. Produire un véhicule électrique demande beaucoup d’énergie et de matériaux afin de satisfaire la production de batteries (à faible durée de vie) notamment. Ainsi, la production d’un véhicule électrique émet deux fois plus de gaz à effet de serre[4] que celle d’un véhicule thermique. En sortie d’usine, la voiture électrique a donc une balance environnementale plus mauvaise qu’une voiture diesel. 

La question de la durée de vie et du recyclage des batteries est donc au cœur du sujet. 

En fonctionnement, une voiture électrique ne pollue presque pas. Sa motorisation n’émet ni gaz à effet de serre, ni gaz nocifs, ni nuisances sonores, comme le ferait une voiture thermique. À ce titre, les voitures électriques ont un rôle déterminant dans la transition énergétique si l’énergie qu’elles consomment est décarbonée. 

Pour preuve, l’étude de l’agence Reuters[5], publiée en 2021, permet de définir à partir de quand l’empreinte carbone de la production d’une voiture électrique est amortie par son utilisation par rapport à celle thermique.

D’après cette étude, le bilan carbone d’un véhicule électrique s’équilibre avec celui d’un véhicule thermique après 30 000 km en moyenne. Le nombre de kilomètres dépend du modèle ainsi que de son lieu de production. De fait, la voiture électrique représente une solution adaptée pour les conducteurs réguliers.

En France, les politiques publiques sont principalement orientées vers l’axe technique via le soutien de la mobilité électrique. A titre d’exemple, le remplacement d’un véhicule thermique par un véhicule électrique est subventionné et encouragé par les pouvoirs publics. Mais ces aides ne sont pas suffisantes pour les ménages les plus modestes (6 000 €[2] pour des véhicules coûtant minimum 25 000 €). Alors que les grandes agglomérations vont progressivement interdire leur accès aux véhicules thermiques anciens dans le cadre des Zones à Faibles Émissions (ZFE), il est indispensable de coupler les actions de conversion du parc automobile par un changement de comportement massif en faveur du partage des véhicules.

En parallèle du processus long et coûteux de la conversion du parc, le partage des véhicules est la solution pour diviser par le nombre de passagers transportés les émissions de CO2 des véhicules en circulation. 

La voiture soutenable pour la planète est celle qu’on partage

Comme vu précédemment, les déplacements courts et pendulaires sont responsables d’une grande partie de l’impact des mobilités sur le climat en lien avec le nombre de personnes qui se déplacent seul en voiture (70 % des trajets domicile travail[6]).

Si on mutualise les véhicules via le covoiturage en augmentant le taux de remplissage, on divise drastiquement la consommation de carburant.

Le partage d’un véhicule amorti l’impact environnemental d’un déplacement et de la voiture déjà en circulation. Grâce à cette consommation collaborative du véhicule, le volume d’émissions de gaz à effet de serre généré par la voiture est divisé par le nombre de passagers, ce qui permet de limiter considérablement l’empreinte carbone par passager. Le covoiturage courte distance, permet d’optimiser le parc de véhicules existant pour en faire un mode de transport et d’augmenter le taux de remplissage des voitures de 2,32 personnes par véhicule (en septembre 2021 et de 2,42 en août 2021).

Klaxit, solution de covoiturage domicile-travail, milite et travaille avec les acteurs publics, les employeurs et les citoyens pour faciliter le changement de comportement des automobilistes. L’objectif est de voir ces derniers se tourner massivement vers des solutions comme le covoiturage qui en plus de lutter contre le réchauffement climatique, permet de diviser les frais par 2 voir 3.

À l’évidence, le fait de changer les comportements n’est pas une pratique facile et demande des investissements dimensionnés à nos objectifs climatiques. L’objectif de 3 millions de covoitureurs quotidiens à atteindre en 2024 fixé par le gouvernement est conséquent et ne sera pas accompli sans un soutien massif à l’écosystème pouvant se traduire par une large communication institutionnelle.

Si l’innovation technologique a une place essentielle dans la transition écologique, elle ne représente pas l’unique levier. Le progrès technique, comme la conversion du parc vers l’électrique, présente aussi des limites que le changement des usages peut réduire en mutualisant l’utilisation des voitures. 

Si le problème n’est pas la voiture, mais la manière dont on s’en sert, la voiture aura toujours un impact sur l’environnement. Reste maintenant à l’utiliser en la partageant pour que cette dernière reste un outil de mobilité soutenable.  


[1] CITEPA, rapport Secten 2020

[2] Prime à la conversion, bonus écologique : toutes les aides en faveur de l’acquisition de véhicules propres

[3] AAA Data, 2020

[4] Interview de Guillaume Devauchelle, directeur de l’innovation de Valeo, Challenge, 17/03/2020

[5] Agence Reuters, Juin 2021

[6] Insee, 2017

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